Teresa Muñoz-Acosta
Des nouvelles de La Tulpa!

Depuis le 1er avril 2018, nous accompagnons 57 familles paysannes de Nariño dans leur transition vers une production d’aliments agro écologiques, sans produits chimiques et plus respectueuse de l’environnement. Ceci, en valorisant les connaissances paysannes ancestrales, mais en tirant aussi parti des progrès technologiques récents en agroécologie.
Les 57 familles paysannes que nous soutenons partagent des buts communs ; elles se sont donc unies autour de La Tulpa, une association paysanne créée dans le cadre du projet. Celle-ci cultive et vend des fruits et légumes bio localement et à des prix justes. Il s’agit d’une nouvelle manière d’organiser la production, basée sur le travail collectif, la recherche d’accords et de consensus entre les différentes familles paysannes. Ainsi, elles décident ensemble quels produits cultiver et à quelle période de l’année, afin d’éviter une production excessive et donc une chute des prix ; elles cherchent à garantir le meilleur prix aux consommatrices et consommateurs, mais également une rémunération adéquate des paysannes et paysans par rapport à leurs coûts de production.
Aujourd’hui, Pacho, Nelson, Billy, Frank, Doralia, Rita, Angi et Loïc conforment l’équipe de coordination de La Tulpa, travaillent avec beaucoup d’engagement et sont responsables du bon déroulement de La Tulpa, c’est à dire de coordonner les activités de production et de commercialisation.

Les paysans et paysannes membres de La Tulpa ont rédigé des statuts et ont légalisé l’association auprès des autorités compétentes.
Les fermes de 57 familles membres de La Tulpa ont été dotées avec le matériel nécessaire pour la production d'intrants naturels. Les paysans et paysannes sont suivis et accompagnés par Nelson (El Encano, Gualmatán, Iles, Cumbal, San Lorenzo et Consacá) et Billy (Matituy et Tunja Grande), qui est également un paysan membre de La Tulpa.
Les producteurs·trices sont très content·e·s de recevoir régulièrement ces visites d’appui-conseil personnalisées. Tout d’abord, cela les rassure, ils et elles se sentent moins seul·e·s. Ces visites leur permettent aussi de trouver des solutions concrètes à des attaques de ravageurs, des maladies et des baisses de productivité. Les producteurs·trices apprennent à fabriquer leurs propres intrants, ce qui réduit leurs dépenses et leur dépendance à la ville. Cela les aide à être de plus en plus autonomes dans leur pratique paysanne et les incite à expérimenter de nouvelles cultures et des techniques qui contribuent à améliorer les connaissances de la Tulpa en agroécologie.

Cette expérimentation se développe sur la parcelle de Billy : une petite serre permet de reproduire et d’adapter des semences, et un potager en courbes à niveau permet de reproduire certaines espèces. Billy fait des expériences de récupération des sols à travers les couvertures et les semis d’engrais verts. Toy, son frère, est responsable de produire presque tous les plantons de La Tulpa. Cette parcelle est devenue aussi un lieu de démonstration précieux, qui permet aux visiteur·euse·s, paysan·ne·s ou consommateurs·trices, de constater les effets et résultats de la production agroécologique.
L’équipe de coordination accompagne aussi les familles paysannes pour planifier leur production, produire de façon variée et selon des critères agroécologiques, et pour être autonomes sur toute la chaîne de production (semences, plantons et intrants), ainsi que pour calculer les prix de production de chaque produit.
Les familles paysannes ont chacune un journal, où elles notent tous les travaux effectués sur la parcelle, et qui contient toutes les recettes nécessaires à la fabrication d’engrais, d’insecticides et de fongicides naturels, puis un récapitulatif du programme de semis, qui leur permet de savoir à quelle date elles doivent semer quoi et en quelle quantité.

La commercialisation est un défi constant. Un travail de promotion et de sensibilisation important doit toujours être mené pour faire comprendre l’intérêt de consommer des produits frais, bio, non contaminés par des engrais chimiques et sans intermédiaires.
Les marchés du vendredi et du samedi sont de plus en plus visités. Les ventes ont considérablement augmenté dans ces espaces, qui sont devenus des moments clés pour promouvoir l’association paysanne. Beaucoup de clients préfèrent se rendre au marché du vendredi ou du samedi, pour pouvoir choisir leurs produits, mais aussi pour l’accueil qui leur est fait et pour les dégustations qui y sont proposées.
Certaines femmes commencent à s’organiser pour transformer les tomates en sauce. Cette initiative est prometteuse, puisqu’elle permet d’écouler et de donner une plus-value aux produits abîmés ou à la surproduction. Cette stratégie permettrait de réduire les pertes de La Tulpa et des producteurs·trices. Cette transformation, pour l’heure artisanale, montre déjà un potentiel commercial intéressant.

Le travail de promotion sur les réseaux sociaux a permis de faire de cette association une référence dans la ville de Pasto. Beaucoup de gens connaissent La Tulpa, ce qui s’est reflété dans une augmentation de l’affluence aux marchés du samedi et aux numéros de personnes qui appellent après avoir vu une publication sur la page Facebook ou Instagram.
La Tulpa est à l’heure actuelle la seule organisation qui s’occupe tant de l’accompagnement constant aux paysan·ne·s dans la production agroécologique sur leurs parcelles, que de la vente de leurs produits. Surtout, c’est la première association qui propose un marché de légumes bio permanent et à des prix justes. Cet aspect novateur est en train de créer un précédent dans cette ville, ce qui a contribué à rendre La Tulpa populaire. On se réjouit d'accompagner l'évolution et la consolidation de cette association paysanne dans les années à venir!
